Nommer un référent harcèlement CSE est une obligation pour chaque comité social et économique. Cette mesure du 1er janvier 2019 vise à lutter contre le harcèlement sexuel et les agissements sexistes.

Destiné à garantir la santé, la sécurité et les bonnes conditions de travail des salariés, le CSE intervient légitimement sur la question du harcèlement en entreprise. L’article L2312-9 du Code du travail l’autorise effectivement à prendre « toute initiative qu’il estime utile ». De la même façon, le Code du travail autorise le CSE à « proposer des actions de prévention ».

Toutefois, les ordonnances Macron créént un statut particulier : un élu CSE peut devenir l’interlocuteur privilégié des victimes. Il s’agit du référent contre le harcèlement sexuel et les agissements sexistes.

Connaître les différents types de harcèlement pour exercer le rôle de référent harcèlement cse

Avant d’étudier les missions de ce référent nommé par le CSE, il convient d’établir la définition juridique du harcèlement.  Aussi, il est important de connaître les infractions voisines afin de savoir comment les identifier.

Dans son guide pratique et juridique sur le harcèlement sexuel et les agissements sexistes au travail, le ministère du Travail distingue plusieurs types de harcèlement.

Définition – harcèlement sexuel

Une personne coupable de harcèlement sexuel impose de manière répétée des paroles ou des comportements à connotation sexuelle. Ces propos sont généralement dégradants et humiliants. Ils portent atteinte à la dignité de la cible et engendrent une situation offensante, hostile et/ou intimidante.

Que l’auteur des faits soit un supérieur hiérarchique, un collègue de même niveau ou d’un service différent ne modifie en rien la nature et la gravité du délit.

Ces propos et comportements relèvent également du harcèlement sexuel lorsque plusieurs personnes visent une seule victime. L’ensemble des auteurs sont coupables de harcèlement sexuel même lorsque l’initiative incombe à l’un d’entre eux seulement. C’est également le cas si ces actions n’ont été commises qu’à une seule reprise par certains.

Important
Une personne qui ne dit rien ne consent pas : une victime qui reste silencieuse face aux actes et propos délictueux n'est pas considérée comme consentante. Autrement dit, l'absence de « non » explicite de la part de la victime ne veut pas dire « oui ». Une personne n'est pas disponible/consentante « par défaut ».

Le harcèlement sexuel assimilé  

Le harcèlement sexuel assimilé désigne lui toutes les formes de pression grave exercées sur une personne dans le but (réel ou apparent) d’obtenir une relation sexuelle. On parle de harcèlement sexuel assimilé même lorsque ses pressions sont exercées au profit d’un tiers.  Il peut aussi s’agir d’humilier la personne par « jeu » et/ou de la pousser à démissionner.

Important
Un acte isolé entre justement dans le cadre du harcèlement sexuel assimilé. Il n’y a pas à attendre que les sévices se répètent pour que le délit soit constitué et punissable. Une occurrence suffit.

Les actes de harcèlement sexuel ou de harcèlement assimilé parmi les plus courants sont les suivants :

  • Chantages à la promotion ou au licenciement
  • Plaisanteries à caractère sexuel, obscènes et grivoises 
  • Remarques portées sur le physique ou la tenue vestimentaire 
  • Regards insistants, sifflements 
  • Offrandes de cadeaux et/ou propositions de sorties malgré des refus 
  • Questions portant sur la vie sexuelle 
  • Envoi de contenus (images, vidéos ou autres) à caractère sexuel ou pornographique

En cas de contact physique imposé, l’auteur des faits va au-delà du harcèlement sexuel et commet une agression sexuelle. Ce délit est plus lourdement puni. L’auteur des faits encourt jusqu’à 5 ans de prison et 75 000 € d’amende.

Les élus CSE doivent être en mesure de recueillir la parole des victimes qui en éprouvent le besoin.

L’agression sexuelle

Une agression sexuelle comprend ainsi toute atteinte physique et sexuelle « commises avec contrainte, violence, menace ou
surprise». Ce sont des attouchements portés sans le consentement de la victime (bouche, fesses, poitrine, cuisses, sexe ou tout autre partie du corps.).

En cas de pénétration de quelque sorte que ce soit, il s’agit d’une situation de viol.

L’agissement sexiste

La notion d’agissement sexiste a été introduite dans la loi en 2015. Cette notion découle du rapport du Conseil supérieur de l’égalité professionnelle femmes-hommes (« Le sexisme dans le monde du travail : entre déni et réalité »).

Ce rapport souligne l’impact du sexisme en entreprise :

  • 93% des femmes salariées considèrent que les réflexions et attitudes sexistes peuvent modifier leur comportement au travail.
  • 92% des salariées pensent que ces agissements impactent la confiance en soi.
  • 92% des salariées subissent une atteinte à leur travail en raison de ces agissements.
  • 53% des salariées disent avoir été très affectées par des comportements de sexisme.

Les agissements sexistes, en plus de plonger les collaboratrices dans la détresse, stressent également les salariés témoins de ces actes. Les agissements sexistes créent une profonde insatisfaction au travail et nuisent à la qualité de vie au travail (QVT) des salariés. Il est donc important que les élus CSE soient en mesure de repérer les différentes occurrences du sexisme en entreprise.

 

Exemples d’agissements sexistes 

Concrètement, les agissements sexistes peuvent relever les actes suivants :

  • Remarques et plaisanteries sexistes, répétées ou non
  • Critiques d’une personne selon les « codes sociaux du sexe » : critiquer un homme insuffisamment « viril » ou une femme insuffisamment « féminine »
  • Incivilités : couper la parole d’une collaboratrice à plusieurs reprises en réunion, ignorer ses demandes, mettre en doute son expertise malgré ses qualifications sur le sujet
  • Langage inapproprié : recours à des surnoms pour interpeller une collègue (« ma chérie », « ma belle », « ma mignonne », etc.) 
  • Fausse séduction 
  • Sexisme dit « bienveillant » : cela consiste à vanter des qualités liées aux stéréotypes de genre (la sensibilité, le sens de l’écoute, la délicatesse pour une femme par exemple) 
  • Remarques sur la parentalité (maternité/paternité) ou les choix de vie familiaux : critiques d’un collègue masculin qui prend un congé paternité, passe du temps avec son/ses enfant·s…

Le sexisme adopte des formes variées. De ce fait, les élus CSE ne l’identifieront peut être pas tous de la même façon. Il est donc primordial de se concentrer sur le ressenti de la personne concernée (la victime) pour déterminer la nature de l’agissement. Aussi, il est essentiel que les élus se rendent disponibles et attentifs.

Il convient de préciser que les outrages sexistes et le harcèlement demeurent des délits difficiles à prouver. Ce n’est pas parce que l’auteur des faits n’a pas été jugé coupable que la victime n’est pas une victime.

Le harcèlement moral

Enfin, on opère la distinction entre les faits de harcèlement à connotation sexuelle et ceux qui en sont dénués. C’est par exemple le cas du harcèlement moral.

Il se caractérise par la répétition d’agissements ayant pour objectif ou pour effet de dégrader les conditions de travail, de porter préjudice à la dignité et/ou aux droits du salarié ciblé. L’avenir professionnel de ce dernier se retrouve ainsi en danger. Le harcèlement morale affecte également la santé physique et/ou mentale du salarié.

Exemples d’actes relevant du harcèlement moral 

Concrètement, le harcèlement moral peut relever les actes suivants :

  • Humiliations, brimades 
  • Propos mensongers, insultes et menaces 
  • Critiques et sarcasmes répétés 
  • Réduction drastique ou augmentation abusive de la charge de travail (pouvant parfois conduire à un bore-out ou un burn-out)
  • Absence de consignes ou consignes contradictoires 
  • Dégradation du cadre de travail (« mise au placard ») 
  • Tâches confiées sans rapport avec la fonction ou dénuées de sens

Pourquoi est-il si important d’acquérir une connaissance exhaustive de ces différents types d’agissements nuisibles ? Sans aucun doute, pour garantir en premier lieu le bien-être des membres de l’entreprise. Cependant, combattre le sexisme au travail est également important dans la mesure où le sexisme favorise des situations de harcèlement sexuel.

Identifier, sanctionner et prévenir les comportements sexistes équivaut donc indirectement à prévenir les agressions.

Un climat de travail imprégné de remarques sexistes pourrait conforter certains individus dans leur sentiment d’impunité à harceler des collègues. 

Faire cesser les actes à caractère sexiste sitôt identifiés participe donc à prévenir des délits futurs.

L’employeur devant assurer la santé et la sécurité de ses employés, se trouve en première ligne. Il doit s’assurer que ces différents agissements ne surviennent pas dans son entreprise. Les élus CSE disposent d’un droit d’alerte qui les autorise à reporter toute observation ou plainte auprès du dirigeant. Ils peuvent ainsi  ouvrir une enquête concertée.

Toutefois, comme énoncé précédemment, les ordonnances Macron ont pris des dispositions supplémentaires : le référent harcèlement CSE.

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Le rôle du référent harcèlement CSE

Il a pour mission d’orienter, d’informer et d’accompagner les salariés confrontés à des situations de harcèlement et de sexisme. Il est obligatoirement nommé dans tous les CSE, sans distinction d’effectifs. Le référent harcèlement CSE occupe sa fonction pour une durée égale au mandat des élus (article L2314-1 al. 4 du Code du travail).

Bon à savoir
Dans les entreprises de moins de 11 salariés, dépourvu de CSE par définition, le rôle de référent est tenu par la commission régionale interprofessionnelle.

La désignation du référent harcèlement CSE

Le référent harcèlement CSE est désigné à la majorité des membres présents lors d’une réunion plénière. En général, il est nommé lors de la première réunion tenue par le comité. C’est durant la première réunion CSE que les élus discutent en profondeur de la composition du règlement intérieur. C’est donc à ce moment-là que les prérogatives du référent harcèlement pourront être actées.

Attention
L’employeur ou son délégataire, le cas échéant, ne vote pas ! (Article L2315-32 du Code du travail)

Élus titulaires, suppléants et représentant syndical sont éligibles. En revanche, un représentant de proximité non élu n’est pas admissible à cette fonction. L’appartenance à la commission santé, sécurité et condition de travail (CSSCT) [?] n’est pas un critère. En effet, cette commission n’est pas installée dans tous les CSE.

Toutefois, si c’est le cas, et dans la mesure où l’article L2315-38 du Code du travail confie à la CSSCT « tout ou partie des attributions du comité relatives à la santé, à la sécurité et aux conditions de travail », il pourrait être recevable de lui laisser choisir ce référent, notamment parmi ses rangs.

Enfin, chaque CSE d’établissement doit nommer son référent harcèlement : il s’agit d’être présent et disponible sur le lieu de travail, là où les agissements surviennent.

Les moyens dont dispose le référent harcèlement CSE

Si le référent est un suppléant du CSE, il profitera du système de mutualisation des heures de délégation pour obtenir un crédit supplémentaire au profit de ses missions grâce à des élus titulaires.

Toutefois, aucune formation obligatoire n’est à ce jour prévue en sus de la formation de 3 ou 5 jours dispensée aux élus, concernant l’exercice de leurs missions en matière de santé, de sécurité et de conditions de travail (article L2315-18 du Code du travail).

Dans les entreprises de plus de 250 salariés, le référent CSE est amené à travailler de concert avec un autre : le référent harcèlement et sexisme, désigné lui par l’employeur.

Le référent harcèlement sexuel et agissements sexistes en entreprise : un second acteur

À la manière du référent harcèlement CSE, ce référent attaché à l’entreprise remplit une mission de prévention, d’accompagnement, de conseil et d’information aux employés. Il est désigné cette fois-ci par l’employeur qui n’est soumis à aucun critère spécifique. La loi permet à tout membre de la structure d’être référent de l’entreprise. L’âge, l’ancienneté, le statut ou les compétences n’entrent pas en ligne de compte pour la désignation du référent.

Il est toutefois courant, car logique, de choisir un profil issu des ressources humaines afin de capitaliser sur des connaissances et compétences existantes. Cela étant, l’employeur demeure libre de son choix et n’a pas à consulter le CSE pour rendre sa décision.

Ce rôle ne s’assortit a priori d’aucune modification du contrat de travail. Il ne s’agit pas à proprement parler d’une délégation des pouvoirs de l’employeur en matière de protection de la santé et des conditions de travail des emplois. Ainsi, le statut de ce référent se rapproche davantage de celui du référent santé-sécurité ou du délégué à la protection des données personnelles (DPD).

Malgré la nature obligatoire de cette désignation, la loi ne prévoit pas de sanctions en cas de manquement. Toutefois, si des cas de harcèlement sexuel et/ou de sexisme se déclarent dans des entreprises d’au moins 250 salariés dépourvues d’un référent employeur, ce dernier s’expose à de potentielles poursuites pour carence organisationnelle et inobservation du Code du travail. La mise en place d’un référent atteste d’une volonté du dirigeant de remplir ses obligations. Il fait ainsi ce qui est en son pouvoir pour préserver ses employés de tels préjudices.

Pourquoi deux référents harcèlement sexuel dans les entreprises d’au moins 250 salariés ?

Tout d’abord parce qu’un nombre d’employés aussi important multiplie les cas possibles d’agissements condamnables, ce qui rend bienvenue la présence de deux interlocuteurs désignés.

Ensuite, s’il arrivait que l’un des deux référents se rende lui-même coupable de harcèlement ou de sexisme, les victimes auraient la
possibilité de s’adresser au second. Il pourra en avertir l’employeur qui suivra la procédure idoine et prononcera des sanctions si les faits reprochés se confirment.

Important
L’employeur a l’obligation d’informer le personnel lorsque des actions contentieuses civiles ou pénales de cette nature sont en cours.

La coordination de tous les acteurs

Afin de pouvoir échanger avec tous les acteurs de la prévention contre le harcèlement et le sexisme, les salariés doivent avoir connaissance des coordonnées des personnes suivantes : les deux référents harcèlement (dans les structures concernées), le médecin du travail, l’inspecteur du travail et le Défenseur des Droits. Les coordonnées sont publiquement diffusées sur le lieu de travail, dans les locaux, à la porte des locaux, sur les tableaux d’affichage, etc. (article D1151-1 du Code du travail).

Bon à savoir
Les témoins de harcèlement sexuel bénéficient d’une protection juridique contre le licenciement ou d’autres mesures discriminatoires (article L. 1153-3 du Code du travail).

Le harcèlement et le sexisme sont des fléaux sévissant en entreprise, bien qu’ils sachent se faire discrets. Ils adoptent des formes multiples et incitent les victimes à s’isoler dans le silence ou dans des stratégies d’évitement, par peur des représailles. C’est pourquoi les rôles de référent, qu’ils soient rattachés au CSE ou à l’employeur, sont d’une importance cruciale.

l’article a répondu à ces questions

  • Quelles sont les différentes formes de harcèlement ?
  • Comment reconnaître le sexisme en entreprise ?
  • Quel est le rôle du référent harcèlement CSE ?
  • Comment désigner le référent harcèlement CSE ?
  • Qui est le référent harcèlement et sexisme de l’employeur dans les entreprises d’au moins 250 salariés ?

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